La palette tout en nuances du (bon) leader

Plus de 10’000 like! Un internaute faisait part récemment sur LinkedIn de son agacement pour le management bienveillant que l’on met à toutes les sauces. Selon lui, si un manager se comporte mal avec son personnel, il est inutile de lui prodiguer des formations, car il est de toute façon incapable de se remettre en question. Il poursuit en écrivant: «C’est une fatalité d’avoir un pourcentage d’incompétents, qui le resteront quoi qu’il advienne.» Une internaute renchérit: l’entreprise devrait se rendre compte qu’un tel agissement n’est pas rentable, qu’il est même dommageable pour les collaborateurs.

La question de la manière de gérer le personnel est toujours d’actualité. Plus de 1000 ouvrages sont référencés en 2017 par Amazon sur ce thème. Mais les avis divergent. D’ailleurs, y a-t-il vraiment un style plus efficace qu’un autre? La mode actuelle parle de leadership participatif, en plaçant l’écoute au centre de l’action: tous au même niveau.

Pourtant, certains CEO à succès n’hésitent pas à générer un climat d’angoisse dans leur entreprise, entre coups de colère, pressions et humiliations. Dans le film retraçant l’histoire de Steve Jobs, on parle du patron d’Apple qui a multiplié les innovations. On le décrit comme irascible, tyrannique et capable de virer ses employés sur-le-champ. Par contre, il parvient à pousser ses collaborateurs jusqu’à leurs limites, afin de produire les meilleures idées.

Plus proche de chez nous, on retrouve un autre exemple en la personne de feu Nicolas Hayek, patron mythique aux intuitions géniales, considéré comme le sauveur de l’horlogerie suisse, mais aussi connu pour son caractère cassant et sa volonté d’omniscience. Historiquement, le Swatch Group est né de la fusion d’ASUAG et SSIH, deux sociétés horlogères précédemment concurrentes aux habitudes bien ancrées. Il y avait de nombreux doublons et il fallait un homme à poigne, un visionnaire au caractère bien trempé pour concilier ces deux cultures d’entreprise.

Dans les contextes de crise, d’urgence, tout s’accélère et les décisions deviennent plus brutales. Selon les spécialistes du changement, l’important consiste à communiquer à ses employés qu’on change de style parce que l’environnement l’exige. En cas de délocalisation, par exemple, si un patron explique suffisamment bien qu’il s’agit d’un effort nécessaire, il peut conserver l’adhésion de ses troupes. Il y a un temps pour le soft management, mais un autre pour le hard management, où on ne peut plus se permettre de discuter. Le charisme ou, à défaut, la cohérence du patron, peut rendre acceptable cette pression.

Lors des assessments, les candidats doivent se positionner comme chef, notamment dans les jeux de rôle, et adopter la posture la plus adéquate, en fonction du contexte. Agir avec une attitude laisser-faire, persuasive, participative, ou alors directive. Le manager agile se doit de trouver le bon comportement au bon moment, pour obtenir les meilleurs résultats, de manière durable. Un éventuel flop peut être l’occasion d’une remise en question fructueuse, avec la volonté de développer sa palette de leadership, pour mieux rebondir sur le terrain.

Article publié sur HR Today . Félix d. Hauswirth, psychologue et consultant en ressources humaines